Qu’est-ce qu’une monnaie locale complémentaire CITOYENNE
Une monnaie locale complémentaire citoyenne (MLCC) comme l’îlot est un type de monnaie qui est accepté dans les commerces situés sur un territoire déterminé. Ce territoire peut être un quartier, une municipalité ou encore une région. Sur ce territoire, la valeur de la monnaie est reconnue par tout le monde et est donc acceptée comme moyen de paiement par certaines personnes. Elle devient un outil que peuvent utiliser les citoyen-nes pour créer et dynamiser les interactions socio-économiques entre les individus, mais aussi entre les commerces. L’un des avantages est que la valeur créée par ces échanges monétaires reste à l’intérieur du territoire. Elle peut ainsi mieux répondre aux besoins de la communauté et de son environnement. En outre, ceci permet de créer un réseau d’acteurs en tout genre engagés autour du bien commun.
La structure, les valeurs et les règles de ce réseau sont déterminées de manière démocratique par les personnes choisissant d’y adhérer – que ce soit des utilisateurs, des commerces ou des organismes communautaires du milieu. Il s’agit du fruit de réflexions collectives orientées autour de trois aspects essentiels du vivre ensemble : l’économique, le social et l’environnemental. À travers cette structure, ces valeurs et ces règles, le réseau peut se donner les objectifs qu’il désire de manière démocratique. Par exemple, la stimulation de l’économie locale ou bien le soutien d’initiatives locales favorisant l’égalité économique, la santé pour tou-tes, l’inclusivité, la solidarité et la transition socio-écologique.
Une MLCC est donc un outil qui permet aux citoyen-nes qui l’adoptent de (re)prendre une part de contrôle sur l’économie locale et de la (re)modeler en fonction de leurs valeurs et des besoins de leur communauté. En ceci, la MLCC s’oppose au modèle économique actuel. Celui-ci est plutôt orienté par les intérêts d’entreprises multinationales qui sont déconnectées des enjeux locaux et dont les décisions sont donc prises sans tenir compte des conséquences qu’elles peuvent avoir sur l’économie, les communautés et les écosystèmes locaux. Or, partout dans le monde, cette recherche de profit mène régulièrement à des conséquences dévastatrices à tous ces niveaux.
Comment ça marche ?
En dehors des valeurs qui sont uniques à chaque MLCC, quelques éléments de base reviennent assez souvent dans les MLCC de par le monde. Par exemple, le fait que chaque îlot équivaut à un dollar canadien. Cette règle facilite les achats en îlots ainsi que la reconversion d’îlots en dollar canadien lorsqu’un commerce en accumule trop pour tous les utiliser au sein du réseau. Cependant, il est important de noter que la reconversion ne doit être utilisée qu’en dernier recours. En effet, pour avoir un réel impact économique, la monnaie doit circuler au sein du réseau le plus longtemps possible et non être reconvertie.
De manière concrète, pour commencer, les utilisateurs de l’îlot doivent s’en procurer en les achetant en dollar canadien. Par exemple, obtenir 100 îlots en payant 100 $. Ils peuvent par la suite les dépenser chez n’importe quel commerce participant au réseau. Puis, ces mêmes commerçant-es peuvent utiliser ces Îlots reçus en paiement pour payer à leur tour des fournisseurs qui participent aussi au réseau, ou bien pour faire leurs propres achats personnels chez d’autres commerces participants, ou bien même verser une partie du salaire de leurs employés qui acceptent d’être payés en Îlots. C’est de cette manière que la monnaie est constamment redistribuée de façon circulaire dans le réseau et que des circuits économiques courts sont créés. À terme, cette circularité a pour effet de (re)valoriser la production locale des biens et services, donc d’augmenter l’auto-suffisance économique et ainsi de garder l’argent dans l’économie réelle locale. Ceci permet de faire en sorte que la richesse qui s’y crée sert prioritairement les besoins et la résilience de la communauté au lieu des intérêts financiers d’acteurs économiques distants donc déconnectés des enjeux locaux.

PetitE histoire
De nos jours, une monnaie locale complémentaire (MLC) est un type de monnaie qui permet de recentrer les échanges économiques et sociaux autour de valeurs de chacune des communautés qui en créé. Ses premiers usages datent toutefois de la grande dépression des années 1930, dans des localités telles que Wörgl en Autriche ou Schwanenkirchen en Allemagne. Dans ce contexte économique difficile, ces deux localités développèrent une monnaie dont le but était la stimulation des échanges locaux pour sortir de la crise économique. En effet, à cause de la dépression, peu ou pas d’argent liquide n’entrait dans les villages. Créer une monnaie locale complémentaire permit de stimuler l’apparition des réseaux économiques locaux – ce qui manquait, ce n’était ni les ressources, ni la main d’oeuvre, mais simplement un outil économique pour permettre de faciliter les échanges.
Bien qu’aujourd’hui les objectifs puissent dépasser les préceptes économiques, les crises économiques semblent encore être un contexte favorisant la création de réseaux d’échanges plus localisés à l’aide d’une MLC. Les réseaux les plus résilients restent toutefois ceux qui y incorporent des valeurs sociales et écologiques.
Au Québec, ces initiatives sont assez récentes. En plus de l’îlot, nous pouvons compter la Chouenne dans Charlevoix depuis 2021, ainsi que le BLÉ à Québec depuis 2018. Le demi en Gaspésie, bien que quelque peu différent, pourrait également être inclus.
Pourquoi des monnaies locales ?
Rejoindre un réseau de monnaies locales complémentaires permet aux individus – que ce soit des consommateurs ou des petits commerces – de créer un réseau économique qui reflète leurs valeurs. En effet, au lieu de se soumettre aux impératifs financiers et capitalistes de l’économie traditionnelle, le réseau de MLC permet d’y intégrer des valeurs plus justes socialement, environnementalement et économiquement.
D’un point de vue individuel, les MLC sont également de bons moyens de rencontrer un réseau d’acteurs engagés socialement et environnementalement et de savoir que son engagement est perpétué au sein du réseau.